«... un matin, comme je me promenais près de mon parterre de rosiers, je vis, je vis distinctement tout près de moi, la tige d'une des plus belles roses se casser comme si une main invisible l'eût cueillie, la fleur resta suspendue dans l'air transparent, toute seule, immobile, effrayante, à trois pas de mes yeux. Saisi d'une épouvante folle, je me jetai sur elle pour la saisir. Je ne trouvai rien. Elle avait disparu... à partir de ce moment-là, je sus qu'il existait près de moi un être invisible qui m'avait hanté et qui revenait. Un peu plus tard, j'en eus la preuve». Confession lucide et maîtrisée d'un homme qui assiste au naufrage de sa propre raison, Le Horla nous révèle la trajectoire secrète et fulgurante qui relie la plénitude de la santé au martyre de la démence. Nul autre récit fantastique — en raison, peut-être, de certains accents autobiographiques — n'a développé avec plus de rigueur et de vérité clinique l'implacable logique de l'imaginaire.