Des Poèmes saturniens, entendons qu'ils sont placés sous le signe de Saturne. Ils seront donc inspirés: il n'était pas inutile de l'affirmer alors que régnaient encore des versificateurs parnassiens. Ils seront aussi baignés d'une rêverie douce et savante, tandis que le poète tournera son regard vers l'intérieur. Point ou peu de récits ou d'anecdotes. Ici l'on se souvient, l'espace d'un sonnet — et non d'un interminable poème — sur un air de chanson grise. Et il n'est pas jusqu'à celle que l'on aime, qui ne prenne une forme incertaine. Tout semble simple. Tout est savant, mais d'une technique si maîtrisée qu'elle a cessé d'être visible, au point que beaucoup s'y sont trompés. Verlaine est un poète à la fois immédiat et difficile. Il exige donc une annotation riche et précise (combien de parodies qui avaient échappé jusqu'à cette édition à l'attention des lecteurs?), une attention à la langue et à la prosodie, alors, mais alors seulement, comme l'avait dit à peu près Ovide: «Maintenant, va, mon Livre, où le hasard te mène!»