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Gallimard-Folio
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Invité par une prestigieuse université de Virginie, un jeune Français découvre émerveillé la vie dorée des college boys, leurs équipes sportives, leur campus dans une vallée paradisiaque. C'est le temps d'une Amérique sage, celle d'avant l'explosion des mœurs et le fracas des années soixante. Très vite, le jeune homme comprend qu'il reste un «étudiant étranger». Il va franchir des lignes, transgresser des tabous, sans même s'en rendre compte : d'abord en faisant l'amour avec une jeune institutrice noire, April. Ensuite en tombant amoureux d'une héritière de Boston, Elisabeth, personnage fantasque et corrosif... Sur un ton limpide de sincérité, ce récit de formation ressuscite, avec humour et nostalgie, les jours fragiles de l'adolescence, quand «tout était la première fois». |
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Ce dialogue, qui est presque un roman, Diderot l'écrit au sommet de son art, à près de soixante ans, et le revoit encore dix ans plus tard. Il met aux prises deux personnages seulement, «Moi», et le Neveu. Ce personnage se dédouble sans cesse: qu'est-ce qu'un homme qui prétend ne pas avoir de conscience, ne pas avoir d'unité, mais qui a en même temps une sensibilité esthétique, celle d'un musicien averti? Diderot mêle la grosse plaisanterie, les motifs et les sujets les plus divers, la lutte contre les adversaires des philosophes, dans cette mise en scène d'une conversation sans fin. Le Neveu pose des questions importantes, et soudain, pour notre amusement, l'argumentation déraille. «Moi» est fasciné par ce bouffon sublime. Ainsi va cet enchaînement de numéros, de pantomimes, cette fausse pièce, ce faux roman, où l'auteur a mis, sous une allure burlesque, toute sa vie, tout son cœur et tout son esprit. |
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«Un jeune Anglais du meilleur monde découvre dans la Vallée des Rois une sculpture qui contient côté de la momie d'un pharaon celle d'une jeune femme merveilleusement belle, Tahoser, dont un papyrus a pieusement recueilli l'histoire. Cette histoire est celle de son amour pour un jeune Hébreu «aux prunelles sombres devant lesquelles semblait danser un rêve», et le Roman de la momie nous transporte à Thèbes, à l'époque de l'Exode et de ses miracles (passage de la mer Rouge, etc.), dans un décor de temples immenses, d'armées innombrables, de prêtres à barbes michélangélo-nilotiques et d'opulentes captives d'Orient. De l'expédition de Bonaparte à Champollion et Aïda, l'Egypte est au cœur de la rêverie romantique, et la Bible est éternelle l'Egypte plus la Bible, qui dit mieux? Et Cecil B. de Mille n'aurait pas fait aussi bien. Quand parut la Momie, Flaubert songeait à un roman égyptien, Anubis. Désireux d'éviter des comparaisons inutiles il mit Anubis au placard, troqua Thèbes pour Carthage, et ce fut Salammbô.» |
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«Aimer toutes les femmes, les posséder toutes, tel est le rêve de Dom Juan. A ce jeu cruel, il consacre sa vie, allant jusqu'à ruer pour satisfaire son désir. S'attaquant à l'aristocratie comme au peuple, à la morale comme à la religion, sa révolte prend de la grandeur dans l'excès. On voudrait souvent rire; on ne le peut pas toujours; Molière le dit bien: «Un grand seigneur méchant homme est une terrible chose».» |
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Selon la légende, les hommes auraient jadis conquis les étoiles. Jadis, d'immenses villes auraient fleuri à la surface de la Terre. Puis les Envahisseurs sont venus, laissant l'Humanité exsangue, confinée sur sa planète natale. Pendant des millénaires, la cité de Diaspar a servi de refuge aux rares rescapés. Une prison dorée, close sur elle-même, sagement gérée par un ordinateur omnipotent. Dix millions d'habitants y naissent et y renaissent artificiellement, sans jamais vraiment mourir... Jusqu'à l'apparition d'un être unique, Alvin, qui refuse cette existence pétrifiée et sans but. Bravant les lois de Diaspar, il va entamer un fantastique voyage parmi les mondes morts, qui le mènera aux confins de la galaxie. Un space opera flamboyant, empreint de poésie et d'aventure. Une œuvre inoubliable par l'auteur des Enfants d'Icare et de Rendez-vous avec Rama. |
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Corydon, dont l'édition originale date de 1911, se présente d'abord comme un essai de clarification 'franc sans paraître cynique et naturel avec simplicité' sur le sujet de l'uranisme. S'appuyant sur Montaigne et Pascal, prenant comme prétexte le livre de Léon Blum, Du mariage, Gide souligne le rôle civilisateur de la pédérastie: 'La décadence d'Athènes commença lorsque les Grecs cessèrent de fréquenter les gymnases.' Néanmoins, il se défend de prononcer son apologie: se laisse tenter qui le veut bien. Aussi, dans ces pages qui ne visent pas à l'audace mais à l'honnête examen d'un état de fait qui dure depuis la plus haute antiquité, André Gide aura-t-il combattu pour que l'homosexualité ne fasse pas de l'homme un 'contrebandier' de la cité, réprouvé aux yeux du monde comme un rebut de la morale. Et par-dessus tout, transperce une joie de vivre et d'assumer son individualité telle qu'elle est. À l'image de ces quatre dialogues avec Corydon, le médecin des âmes, Gide aura enfin démontré la prééminence des rapports sans équivoque entre les êtres. |
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L'auteur meurt à la première ligne. Au moment où il survole, avec un sentiment de mélancolie dû à sa situation, la Douane de mer à Venise, il tombe sur un esprit venu d'Urql, dans une lointaine galaxie, pour étudier l'univers. L'esprit surgi d'ailleurs s'appelle A. Il considère avec stupeur une planète dont il ne sait rien et qu'il a du mal à comprendre. Le défunt s'appelle O. Avant de quitter à jamais pour une destination inconnue les bonheurs et les plaisirs de notre vallée de larmes, O va présenter le monde à son nouvel ami. Trois jours durant, à l'usage des gens d'Urql qui ont le malheur d'ignorer que nous sommes le centre de tout, A et O, aile contre aile, parcourent l'espace et le temps et rédigent un rapport sur la Terre et les hommes. |
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Ce fut ainsi qu'Albine et Serge marchèrent dans le soleil, pour la première fois. Le couple laissait une bonne odeur derrière lui. Il donnait un frisson au sentier, tandis que le soleil déroulait un tapis d'or sous ses pas. Il avançait, pareil à un ravissement, entre les grands buissons fleuris, si désirable, que les allées écartées, au loin, l'appelaient, le saluaient d'un murmure d'admiration, comme les foules saluent les rois longtemps attendus. Ce n'était qu'un être, souverainement beau. La peau blanche d'Albine n'était que la blancheur de la peau brune de Serge. Ils passaient lentement, vêtus de soleil; ils étaient le soleil luimême. Les fleurs, penchées, les adoraient. |
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Le premier roman de l'enfant sublime: Hugo n'a guère plus de vingt ans lorsqu'il l'achève, et Han d'Islande plaide la thèse de l'alliance du roi, de la jeunesse et du peuple face à l'absolutisme du mal qui tient d'abord à ce qu'on meurt de faim aux portes des palais. L'action se passe au XVIIe siècle dans un royaume scandinave que terrorise un être bestial, Han, qui vit seul avec un ours et ne se nourrit que de sang humain. Un monstre, une révolte populaire, des amours contrariées qui évoquent celles de Hugo et d'Adèle Foucher, et une prison où est enfermé un ministre innocent que délivrera un chevalier à la Dürer. Han, c'est à la fois Frankenstein et la préfiguration de Quasimodo, et le roman témoigne de la fascination qu'ont exercé sur le premier romantisme les cultures nordiques, qui vivent de sang et de nuit mais qui ont aussi inventé la liberté. |
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Autrefois, il y avait un cauchemar dans mon placard. Aussi, avant d'aller dormir, je fermais soigneusement la porte. Une nuit, j'ai décidé de me débarrasser, une fois pour toutes, de mon cauchemar. Un livre tellement réconfortant: à prescrire absolument... |
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An 584. Khanaor est une île lointaine de l'Atlantique que l'on chercherait en vain sur une carte. Des antagonismes profonds divisent les quatre Etats qui la composent, et l'alliance de deux d'entre eux, la Goldèbe et l'Aquimeur, vient rompre le statu quo ancestral. Entre la fureur humaine et celle des éléments ensorcelés, une poignée d'errants cherche sa voie: Sigrid, la petite magicienne proscrite; Kurt, le charmeur de plantes qui aime les hommes; l'Anserf, l'esprit désincarné de l'île... Tous auront une influence sur l'avenir de Khanaor, et tenteront de la sauver du chaos. Roman de fantasy réussissant l'exploit d'être à la fois classique et atypique, Khanaor, paru pour la première fois en 1983, est la seule incursion de Francis Berthelot dans ce genre. L'auteur faisait alors oeuvre de précurseur avec ce texte qui n'a rien perdu de sa puissance et de son originalité. |
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Après René Char (Commune présence), Henri Michaux (L’espace du dedans), Paul Éluard (J’ai un visage pour être aimé), voici en Poésie/Gallimard, L’encre serait de l’ombre, l’anthologie personnelle de Philippe Jaccottet. Un choix qui reprend l’ensemble d’un parcours, mais qui apparaît surtout comme la reprise continue d’une suite de questionnements. Car si la voix de Philippe Jaccottet semble si naturelle, si évidente, elle n’a de cesse pourtant de contester ce surgissement, cet afflux de paroles, cette profération d’encre qui ne brûle pas le papier et rarement les songes. Quel risque y a-t-il à écrire? Pourquoi tant d’exaltations, de fictions, de tourments à blanc? N’y a-t-il pas dans le réel des espaces moins vains en marge de l’écume des mots et au coeur même des choses? Face à son art, qui n’a que peu à voir avec une activité littéraire, mais qui voudrait éveiller, agir ou non-agir en connaissance de cause, l’attitude de Philippe Jaccottet est d’abord éthique. J’aurais voulu parler sans images, simplement pousser la porte, confie-t-il. Comment, par le leurre de l’écriture lever le voile qui couvre le monde et le temps? Philippe Jaccottet se veut un promeneur attentif, disponible, capable d’émerveillement aussi bien que d’effroi, et qui transmet son approche lucide, sombre ou éblouie, de la lumière en chacune de ses métamorphoses. Il ne témoigne pas du spectacle de la nature mais de la nature du mystère. Il participe plus qu’il n’assiste aux éblouissements fugaces qui sont autant de révélations simples sous un ciel déserté par les dieux. Il est celui qui approche au plus près du point où la vision et la vie paraissent aptes à se fondre. Comme s’il accédait, par grâce singulière et fragmentée, à une sorte d’entre-monde où la pensée est action, le sentiment intelligence, la beauté oxygène et poésie la trame secrète des jours. L’oeuvre de Philippe Jaccottet fait escorte, parfois sombrement, quelques fois sereinement, à la part incertaine et sublime qui, par éclairs, par effractions, apparaît, déchire, force ou découvre le passage. Je pense quelquefois que si j’écris encore, c’est, ou ce devrait être avant tout pour rassembler les fragments, plus ou moins lumineux et probants, d’une joie dont on serait tenté de croire qu’elle a explosé un jour, il y a longtemps, comme une étoile intérieure, et répandu sa poussière en nous. |
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Laisse-lui la liberté, disait-on dans la salle à boire. Qu'est-ce que tu veux la faire travailler? elle n'est pas faite pour ça. Laisse-lui la liberté, sans quoi tu risques de l'éteindre... C'est comme les ailes des papillons: si tu les touches, elles deviennent grises... Laisse-la Courir. Juliette, une jeune orpheline cubaine, rejoint son oncle dans un village près du lac Léman. Sa beauté réenchante le monde: elle illumine la terre, l'air et l'eau. Mais est-elle, pour les hommes qui la contemplent et la désirent, une bénédiction? Charles-Ferdinand Ramuz nous offre une fable métaphysique, un récit lyrique sur la beauté et le scandale qu'elle cause. |
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La Mare au Diable est un lieu maudit où souffle l'angoisse. Près d'elle se déroule toute l'histoire. Un paysan, veuf avec ses enfants, cherche femme. Qui épousera-t-il? celle qu'on lui a promise, ou une pauvre paysanne, harcelée par son patron? Cette petite Marie est l'âme d'un paysage de rêve, et l'emblème de l'enfance éternelle. Un roman d'amour, mais traversé par le cri des chiens fous, la nuée sanglotante des oiseaux, le fossoyeur épileptique. La voix de la terre s'y accorde avec celle de l'Âme enfantine: George Sand y parle avec force du sol natal et des premiers souvenirs. |
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Un jour, Alexandre Eiffel s'aperçoit avec effroi qu'il est devenu une grande personne, un empaillé de trente-huit ans. Esclave de son agenda, il ne copule plus guère et se prélasse sans honte dans la peau d'un mari domestiqué, indigne du petit garçon rebelle et vivant qu'il fut, celui à qui son papa disait: — Le Petit Sauvage, tu es un fou! Alexandre décide de réveiller l'enfant en lui. Il quitte l'épouse qui lui servait de bouillotte, rachète la maison où vécut le Petit Sauvage, part retrouver la Société Secrète des Crusoé et surtout Fanny, son bateau bleu et ses lèvres inoubliables. Mais les ans ont passé et le retour aux amours enfantines ne pourra se faire que grâce à Manon, la contrôleuse des volcans, qui fit si bien l'amour dans les branches des arbres. Adulte qui joue à l'enfant, enfant qui joue à l'adulte, Alexandre est la création la plus originale de l'auteur du Zèbre. |
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Comme il marchait la tête basse et les yeux fichés en terre, il sentit quelqu'un qui lui tapait l'épaule, et se retournant il vit la petite-fille de la mère Fadet, qu'on appelait dans le pays la petite Fadette, autant pour ce que c'était son nom de famille que pour ce qu'on voulait qu'elle fût un peu sorcière aussi. Vous savez tous que le fadet ou le farfadet, qu'en d'autres endroits on appelle aussi le follet, est un lutin fort gentil, mais un peu malicieux. On appelle aussi fades les fées auxquelles, du côté de chez nous, on ne croit plus guère. Mais que cela voulût dire une petite fée, ou la femelle du lutin, chacun en la voyant s'imaginait voir le follet, tant elle était petite, maigre, ébouriffée et hardie. C'était un enfant très causeur et très moqueur, vif comme un papillon, curieux comme un rouge-gorge et noir comme un grelet. |
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C'est Paul qui parle, un paysan fruste et violent qui ne chérit que ses bêtes. À ses côtés sa femme, détestée et muette, souffre d'un mal qu'il refuse d'admettre. Lorsque l'ouvrier Georges, le temps d'une saison, s'installe chez eux à la ferme, le regard de Paul insensiblement se transforme. |
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