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Gallimard-Folio
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«L'Autre Monde est le récit d'un double voyage dans l'espace vers Les Etats et Empires de la Lune et vers Les Etats et Empires du Soleil. Il est en cela le roman du monde tel que la nouvelle science et l'astronomie naissante permettent de l'imaginer, infini et habité, et où la Terre n'est qu'une planète parmi les autres. Mais malgré l'ingéniosité des machines-à-voler et la forte présence de la science, ce n'est pas un roman de science-fiction. Le voyageur doit là-haut affronter des peuples et des sociétés dont les vérités chahutent les certitudes de l'humanité terrestre et chrétienne. Le voyage dans l'espace devient voyage dans le temps, chacun des personnages rencontrés incarnant successivement un des discours qui se sont tenus sur l'origine et sur «la nature des choses»: des présocratiques à Gassendi, des récits fabuleux à Descartes. Si peu héroïque que paraisse le personnage principal, il est donc l'acteur d'une aventure intellectuelle mais qui a ses moments de comédie et de poésie, venant interrompre parfois la tension née de l'audace d'un texte qui proclame la faillite des modèles et la débâcle des dogmes.» |
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Tandis que de sa main gauche blessée il tenait l'assassin, il se mit à chercher, en tâtonnant de la droite, le cordon du rideau: cela dura très longtemps, enfin il le saisit et l'arracha. Lui-même fut surpris, plus tard, de l'effort extraordinaire que cela nécessita. Durant ces trois minutes, ni l'un ni l'autre ne laissèrent échapper un seul mot. On n'entendait que leur respiration oppressée et le bruit sourd de la lutte. Etant enfin parvenu à ligoter les bras de Pavel Pavlovitch ramenés derrière le dos, Veltchaninov le jeta à terre, se dressa, écarta le rideau et leva le store. |
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«Pavel Egorovitch Khvatkine, «honnête» professeur de droit, croyait bien avoir échappé à son passé d'ancien membre très influent des sections spéciales du KGB à la toute fin du règne de Staline. Or, lors d'une soirée bien arrosée, surgit un homme se prétendant «gardien des fourneaux de l'enfer» et venu lui demander des comptes sur sa carrière passée... Ecrit entre 1976 et 1980 et longtemps tenu secret, L'Evangile du bourreau, peinture sidérante du système répressif soviétique sous Staline, a fait sensation lors de sa première publication en ex-URSS. Sa langue faite de russe classique et d'argot des bas-fonds comme son étonnante galerie de bourreaux parfaitement intégrée dans un suspense romanesque font de ce livre un thriller inoubliable.» |
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Dans les épaisseurs de la nuit sèche et froide, des milliers d'étoiles se formaient sans trêve et leurs glaçons étincelants, aussitôt détachés, commençaient de glisser insensiblement vers l'horizon. Janine ne pouvait s'arracher à la contemplation de ces feux à la dérive. Elle tournait avec eux, et le même cheminement immobile la réunissait peu à peu à son être le plus profond, où le froid et le désir maintenant se combattaient. |
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Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles dans la paisible ville de Quiquendone, perdue dans les Flandres. C'est sans compter sur l'arrivée de l'étrange docteur Ox qui, sous prétexte de fournir de l'électricité à la ville grâce à un concept révolutionnaire, teste, à l'insu des habitants, son gaz oxy-hydrique qui a le pouvoir de changer le caractère des gens. La folie s'empare peu à peu des esprits... Une farce pleine d'humour et de piquant sur les méfaits de la science sans conscience et la bêtise humaine. |
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«À ce moment, le gendarme Rengade écarta brusquement la foule des curieux. Dès qu'il avait appris que la troupe revenait avec plusieurs centaines d'insurgés, il s'était levé. Dehors, sa blessure se rouvrit, le bandeau qui cachait son orbite vide se tacha de sang. Sa tête pâle enveloppée d'un linge ensanglanté, il courut regarder chaque prisonnier au visage, longuement. Et, tout d'un coup: «Ah! le bandit, je le tiens»! cria-t-il. Il venait de mettre la main sur l'épaule de Silvère. Rengade se tourna vers l'officier, qui n'avait pu trouver parmi les soldats les hommes nécessaires à une exécution. «Ce gredin m'a crevé l'œil, lui dit-il en montrant Silvère. Donnez-le-moi... Ce sera autant de fait pour vous».» |
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- Il m'a empoisonnée? — Eh oui, madame. — Mais pourquoi? Pourquoi? — Vous le gêniez, répond la vielle dame. Il a eu votre dot. Maintenant il lui faut celle de votre sœur. Eve joint les mains dans un geste d'impuissance et murmure, accablée: — Et Lucette est amoureuse de lui! La vieille dame prend alors une mine de circonstance: — Toutes mes condoléances... Mais voulez-vous me donner une signature? Machinalement, Eve se lève, se penche sur le registre et signe. — Parfait, conclut la vieille dame. Vous voilà morte officiellement. Eve hésite, puis s'informe: — Mais où il faut que j'aille? — Où vous voudrez. Les morts sont libres. |
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Lorsque Machenka parut en anglais en 1970, les lecteurs y apprécièrent surtout les échos du premier amour de Nabokov, la «Tamara» de son autobiographie récemment révisée, Autres rivages. Mais pour le public, ce n'était pas tant un récit autobiographique qu'un portrait de l'exil. Nabokov est ici l'observateur scrupuleux de la vie d'émigré. Situé en avril 1924, quand les Russes fuyaient Berlin en masse, le récit montre Ganine en train de se préparer vaguement à partir de la France. Alfiorov, qui vient d'emménager dans la chambre voisine de celle de Ganine, se prépare à accueillir sa femme, bloquée depuis des années en Russie soviétique, qui doit le retrouver dans six jours, et compte bien l'installer dans la chambre de Ganine. Ganine découvre alors que la femme d'Alfiorov n'est autre que Machenka, son premier amour, avec qui il avait goûté en 1915 tous les délices d'une radieuse passion de jeunesse, jusqu'à ce qu'un an après ils se perdent de vue. En entendant de nouveau son nom, Ganine est brutalement sorti de son engourdissement et revit dans sa mémoire toute la félicité du passé, avec une violence qui efface le présent. Ganine décide de quitter Berlin avec Machenka et, la veille de son arrivée, enivre un Alfiorov surexcité jusqu'à ce qu'il s'effondre inconscient. Il se dirige alors vers la gare pour être le premier à retrouver Machenka et l'escamoter ensuite... |
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«Quatre «scènes de la vie privée», quatre nouvelles écrites autour de 1830 qui nous montrent Balzac commençant son enquête sociale, prenant pied dans le réel, posant les premières pierres de l'édifice de La Comédie humaine. Cette comédie est d'abord celle de l'amour, et trois de ces récits nous disent des mariages ratés, l'un par incompatibilité culturelle, l'autre par arrogance sociale, le troisième par folie de vengeance familiale. Mais par-delà le romanesque de l'intrigue apparaît la variété bientôt foisonnante des types et des conditions: boutiquiers et gens de cour, vestiges de l'Ancien Régime, lions et loups de la Restauration, en même temps que Balzac découvre le Paris mystérieux et cruel qui sera l'un des personnages principaux de son œuvre.» |
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Ils devaient partir en vacances dans le Sud. La maladie subite de leur fils en décide tout autrement. Le père, médecin, veille sur l'enfant et, tandis qu'il reste à son chevet, lui reviennent en mémoire des souvenirs enfouis... Une histoire, dans sa jeunesse, d'un oncle disparu du jour au lendemain après être passé à la ferme que tenaient ses parents. La mère s'y trouvait seule. L'enfant, dans la maison, n'avait rien vu à l'époque. Il avait trouvé plus tard, sur un tas de débris utilisé par le père, loin dans la campagne, des traces du disparu. La venue des gendarmes, pour lui qui n'avait qu'un regard de gosse, s'était pourtant teintée de la couleur du non-dit. La mère avait arrangé une vérité. Cette dernière avait par la suite décidé de sa vie... |
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Cela est vrai, d'honneur! Je ne sais plus ce que je suis, mais depuis quelque temps je sens ma poitrine agitée; mon cœur palpite au seul aspect d'une femme; les mots amour et volupté le font tressaillir et le troublent. Enfin le besoin de dire à quelqu'un. Je vous aime est devenu pour moi si pressant que je le dis tout seul, en courant dans le parc, à ta maîtresse, à toi, aux arbres, aux nuages, au vent qui les emporte avec mes paroles perdues. — Hier je rencontrai Marceline... SUZANNE, riant. Ah! ah! ah! ah! |
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Charles est bouleversé lorsqu'il apprend le monstrueux secret de la fortune d'Henri, son beau-frère. Il se barricade dans le grenier pour y réfléchir et ni les appels de sa femme ni les suppliques de ses filles ne le feront le quitter. Seule la certitude de tenir son beau-frère à sa merci pourra le convaincre de sortir... |
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Christophe Colomb trouva son nouveau monde à cinquante ans. Rabelais avait à peu près le même âge, ou un peu plus, quand il trouva le sien. La nouveauté du fond fut signalée par celle de la forme. La langue française apparut dans une grandeur qu'elle n'a jamais eue, ni avant ni après. On l'a dit justement: ce que Dante avait fait pour l'italien, Rabelais l'a fait pour notre langue... Mais pour le fond, à qui le comparer? A l'Arioste? A Cervantès? Non, tous deux rient sur un tombeau, sur la patrie défunte, et la chevalerie inhumée. Tous deux regardent au couchant. Rabelais regarde l'aurore... Il cingle à l'Est, vers les terres inconnues. |
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- Retournez-vous, dit le marchand en saisissant tout à coup la lampe... et regardez cette Peau de Chagrin... Puisque vous êtes un orientaliste... peut-être lirez-vous cette sentence... Ce qui voulait dire en français, si tu me possèdes. Tu posséderas tout, mais ta vie. M'appartiendra, Dieu l'a voulu ainsi. Désire, et tes désirs seront accomplis. Mais règle: tes souhaits sur ta vie. Elle est là. A chaque vouloir Comme tes jours. Me veux-tu? |
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A la dernière pointe de la Terre de Feu, là où entrent en collision les deux océans, l'Atlantique et le Pacifique, existe une île où un phare empêche les voiliers de se briser sur les récifs. Dans cette région inhabitée sévit une bande de naufrageurs, un ramassis de déchets humains qui attirent les navires sur les côtes pour les piller après avoir massacré les survivants. Les gardiens du phare tentent de contrecarrer leurs plans dans ce combat contre les forces du Mal représentées par les bandits et leur chef, le diabolique Kongre... |
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«Un couple de commerçants parisiens, les Roland, retirés au Havre. Deux fils: Pierre et son cadet Jean, «aussi blond que son frère était noir, aussi calme que son frère était emporté, aussi doux que son frère était rancunier». Pierre et Jean ne s'aiment pas, mais la famille vit en paix jusqu'au jour où l'on apprend qu'un vieil ami des Roland a laissé en mourant toute sa fortune à Jean. Pourquoi à Jean seul? De ce qui aurait pu être un banal drame de boulevard, Maupassant a fait une tragédie concise et cruelle, où affleure le thème du Double qui va bientôt hanter sa folie. Et le livre contient, sur la mer, les bateaux, la lumière, la campagne normande, quelques-unes des plus belles pages de la littérature impressionniste.» |
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«Ce qui est médiocre, dit un personnage dans Ionytch, ce n'est pas de ne pas savoir écrire des nouvelles, mais d'en écrire et de ne pas savoir le cacher». Petit clin d'œil ironique d'Anton Tchékhov, qui a publié des centaines de nouvelles... et ne l'a pas caché. Celles qui composent le présent recueil ont été écrites entre 1891 et 1898. Tchékhov est au sommet de son art, mais on peut trouver que son inspiration devient de plus en plus noire. Ses héros ne vivent pas des tragédies. Ils s'enlisent dans l'ennui, la monotonie des jours, la banalité. Le romanesque repose d'habitude sur la singularité d'un individu. Tchékhov réussit le tour de force de le créer avec des gens ordinaires. Seule exception, la longue nouvelle Récit d'un inconnu comporte des péripéties, des voyages, des coups de théâtre. Un socialiste s'introduit comme domestique chez le fils d'un grand personnage, afin de surprendre les secrets du père, voire saisir une occasion de l'assassiner. Mais une femme survient...» |
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«Des «noces vermeilles» de Marguerite de Valois et Henri de Navarre, prélude au massacre des protestants, à la mort de Charles IX baignant dans une rosée de sang, les deux années qui s'écoulent comptent parmi les plus cruelles de l'histoire de France. Guerres civiles de religion, luttes d'influence au sein de la famille royale, complots et assassinats politiques forment la trame sombre sur laquelle se détache la figure de Margot. Beauté incomparable, dame galante, cette fille de France est aussi une femme de lettres doublée d'une redoutable politique; Marguerite est avant tout une Valois, fille de roi, soeur de roi, femme de roi. Et le brave La Mole, ce jeune gentilhomme protestant réfugié dans l'alcôve royale pour échapper à ses assassins la nuit de la Saint-Barthélemy, sait que l'amour qu'il voue à cette perle le précipitera au coeur d'intrigues de pouvoir où la vie d'un homme n'a guère de poids.» |
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Après trente ans de travail acharné, Stendhal est digne d'improviser; il sait peindre d'un premier trait, d'un seul trait. Il a lentement créé cet instrument de prose rapide, qui est lui-même: son style le plus parfait est devenu sa voix naturelle. L'originalité n'est plus un but qu'il se propose: elle est en lui... La revanche imaginaire, ce rêve de compensation qui succède à la douleur de l'échec et en marque la convalescence, est un des excitants les plus forts de l'imagination créatrice. C'est sous cet aspect de revanche imaginaire qu'il faut voir la transposition de Stendhal en Julien, la beauté de Julien, sa minceur. Les souvenirs directs gardent leur accent secret et déchirant parce qu'ils sont placés parmi les enthousiasmes de la revanche imaginaire. |
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Il faisait un clair de lune si magnifique qu'on aurait pu tout lire, même un journal du soir. Par le silence des bois, et, à cette lueur pure, le baron vit une femme seule qui, tout en montant dans une voiture de louage, regarda le singulier spectacle de cette calèche endormie. A la vue de cet ange, le baron de Nucingen fut comme illuminé par une lumière intérieure... Il se dressa sur ses pieds. — Hau crrante callot! fichi pédate ki tord! cria-t-il. — Sante frante si di haddrappe cedde foidire. |
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